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Membre de l'Ordre du Bleuet
Texte de Christiane Laforge
lu à la présentation de Gatien Moisan
au Gala de l'Ordre du Bleuet, le 6 juin 2015
Né à Saint-Raymond-de-Portneuf le 11 janvier 1939, Gatien Moisan s’est épris du Saguenay–Lac-Saint-Jean autant, pourrait-on croire, que de sa compagne de vie, la saguenéenne Gilberte Dufresne. Nomade professionnel qui a connu quelques va-et-vient d’un lieu à l’autre, il demeure indissociable de cette région où il s’est inscrit à la fois comme professeur et créateur réputé pour sa rigueur.
Diplômé de l’École des Beaux-Arts de Québec en 1962 où il a étudié auprès de Jean-Paul Lemieux, Gatien n’a eu de cesse de se perfectionner, notamment en émail sur cuivre auprès de Thérèse Brassard, en gravure auprès de Benoît East, en vitrail avec Marius Plamondon et en dessin auprès de Paul Lacroix et Jean Soucy.
Engagé à la Commission scolaire de Chicoutimi en 1964, il a tôt fait de s’intégrer au sein des plus ardents défenseurs des arts au Saguenay. Avec John Hugh Barret, Jean-Guy Barbeau, Roland Ruelland, Jean-Eudes Vaillancourt et Guy Tay, il est parmi les artistes de la première heure qui ont contribué au rêve de Pierrette Gaudreault. Soit ouvrir une école d’art à Jonquière formant des enfants dans diverses disciplines dont les arts visuels. Prélude à l’Institut des arts au Saguenay qui aura permis l’implantation du Centre Culturel du Mont-Jacob en 1967, abritant le réputé Centre national d’exposition où, en 2009, Gatien Moisan a célébré ses 50 ans de carrière lors d’une rétrospective mémorable.
D’abord professeur de céramique à l’Institut des arts, il dirige le département des Arts plastiques du collège de Jonquière, avant d’être recruté comme chargé de cours et professeur de peinture à l’UQAC de 1970 à 1982.
Les amateurs d’art quant à eux découvrent un artiste, très apprécié par ses élèves, qui impressionne par son souci d’une perfection qui ne se démentira jamais. Gatien Moisan n’a cessé de traquer le visible dans sa plénitude, avec les outils mis à sa disposition selon chaque époque. En cela, il devient un des plus futuristes de nos artistes. Visionnaire qui dépasse le présent et, pour cela peut-être, considéré à tort inaccessible.
Au début des années 1970, alors qu’ils résident à Sainte-Rose-du-Nord, Gatien et Gilberte s’investissent dans le Festival des artisans qui sera victime de sa popularité, son succès croissant au rythme de la grogne de ceux qui n’en voient qu’un grand dérangement, même s’il a attiré un géant, tel Félix Leclerc en 1974. La décennie 70 est un bouillonnement de culture au Saguenay–Lac-Saint-Jean. On assiste à la naissance de compagnie de théâtre, les écoles de musique et de danse attirent des centaines de jeunes et les arts visuels s’éclatent sur les cimaises avec une vitalité où tout semble permis. L’art de Gatien s’impose avec bonheur et rayonne dans les galeries en Ontario, au Québec, en Alberta, en Colombie-Britannique et aux États-Unis. Boursier de la Fondation Élisabeth Greenshield, du ministère des Arts et de la Culture du Québec, artiste invité à la Burnaby Art Gallery de Vancouver et du Glendon College de l’Université York de Toronto, il réalisera quelque sept projets d’intégration de l’art à l’architecture dans autant de villes de la province du Québec. En 1997, il sera le peintre officiel du 39e président de l’Assemblée nationale, Roger Bertrand.
Si bien intégré à sa région d’adoption soit-il, l’artiste et sa famille quittent le fjord en 1981. Il se résigne à l’exil, faisant escale en diverses régions pour y vivre de son art. Il balise son existence au nombre de ses déménagements. Plus de dix en 25 ans, jusqu’à son retour en 2004 où il bâtit maison non loin de Saint-Félicien, pour finalement passer par Saint-Honoré avant de s’installer à Chicoutimi. « L’homme en fuite c’est moi, confie-t-il devant ses toiles où son personnage est souvent happé par l’espace. Ma dernière résidence sera mon urne, quoique là encore, on peut la déplacer », taquine-t-il. En vérité, son lieu de vie est le cordon parental qui le lie avec intensité à ses filles, Mira ardente compétitrice à la Ligue d’improvisation montréalaise et Sara, marionnettiste, comédienne et metteure en scène qui fait appel à ses talents de scénographe, comme pour Morceaux choisis, pièce qu’elle a créée en 2005.
L’œuvre de Gatien Moisan témoigne à la fois d’un langage visuel sans cesse en évolution reposant sur la règle d’or ou la divine proportion définie par les maîtres de la Renaissance, où s’intègre ce qu’il capture du regard, visions extérieures et intérieures, aux matériaux et outils qu’il maîtrise. De l'art abstrait à la nouvelle figuration, l'artiste travaille différents médiums, comme l'huile, l'acrylique, l'émail, la photographie, le multimédia. Il n'hésite pas à s'abandonner, explorant les nouvelles technologies : des logiciels, comme Photosphop ou Carrara. Sur ses toiles, on voit la grandeur humaine confrontée à l’espace. Et s’il utilise son propre corps nu pour en exprimer la forme et le sens, s’il s’empare de ce qui l’entoure — entre autres sa fille enfant, les rochers de Sainte-Rose-du-Nord — c’est que l’objet est le tremplin d’une réflexion picturale qui nous entraîne aux confins d’une vision. En cela, Gatien Moisan est l’artiste dans ce qu’il a de plus noble et de plus absolu.
Le 6 juin 2015
Gatien Moisan
Peintre, pédagogue, artiste visionnaire
Pour sa contribution exceptionnelle au développement des arts visuels
fut reçu membre de l’Ordre du Bleuet
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POURQUOI L'ORDRE DU BLEUET
L'intensité et la qualité de la vie culturelle et artistique au Saguenay-Lac-Saint-Jean est reconnue bien au-delà de nos frontières. Nos artistes, par leur talent, sont devenus les ambassadeurs d'une terre féconde où cohabitent avec succès toutes les disciplines artistiques. Cet extraordinaire héritage nous le devons à de nombreuses personnes qui ont contribué à l'éclosion, à la formation et au rayonnement de nos artistes et créateurs. La Société de l'Ordre du Bleuet a été fondée pour leurs rendre hommage.La grandeur d'une société se mesure par la diversité et la qualité de ses institutions culturelles. Mais et surtout par sa volonté à reconnaître l'excellence du parcours de ceux et celles qui en sont issus.